“J’irai revoir ma Normandie” CA Paris 17 déc. 2021″ un commentaire de Vincent MAURIAC et Mathilde CRON
Par un arrêt du 17 décembre 2021, la Cour d’appel de Paris confirme la décision rendue par le Directeur général de l’INPI ayant refusé à l’enregistrement la demande de marque NORMINDIA qui désignait des « boissons alcoolisées (à l’exception des bières) » en classe 33, jugeant que :
« C’est, dès lors, à juste titre, que l’enregistrement sollicité postérieurement aux IGP susvisées du signe NORMINDIA, fortement évocateur de la Normandie, a été refusé pour des boissons alcoolisées ne bénéficiant pas de l’une de ces IGP. De plus, c’est également pertinemment qu’il a été retenu que le signe NORMINDIA, est, au sens de l’article L.711-3 du code de la propriété intellectuelle de nature à tromper le public sur la provenance géographique du produit, alors qu’il peut être appliqué à des produits d’une toute autre provenance géographique ».
A suivre le raisonnement de la Cour, d’une part, le signe NORMINDIA serait déceptif.
Selon elle, le public serait amené à penser que les produits identifiés sous ce signe proviennent nécessairement de la Région de Normandie alors que, sans autre précision dans le libellé, les produits visés étaient susceptibles de provenir d’ailleurs.
D’autre part, la Cour retient comme motif de rejet, la violation de la protection due aux indications géographiques protégées (IGP) par le droit de l’Union européenne « Cidre de Normandie » et « Cidre Normand », « Eau-de-vie de cidre Normandie », « Eau-de-vie de poiré de Normandie », « Pommeau de Normandie ».
En effet, il ressort de l’application combinée des articles 16 du Règlement UE n°110/2008 et 13 du Règlement UE n° 1151/2012 que les IGP précitées sont protégées contre toute utilisation directe ou indirecte par des produits non couverts par l’enregistrement, dans la mesure où ces produits sont comparables à la boisson spiritueuse enregistrée sous cette indication géographique.
En l’occurrence, les produits visés par la demande de marque litigieuse (« Boissons alcoolisées ») sont considérés comme comparables aux « eaux-de-vie », « pommeau » et « cidres » des IGP susvisés, en ce qu’ils sont inclus dans la catégorie plus générale des boissons alcoolisées.
Par ailleurs, la Cour considère que le signe contesté NORMINDIA présente une « forte similitude, tant visuelle et phonétique qu’intellectuelle » avec le nom de la Région NORMANDIE dont il constituerait l’imitation ou, à tout le moins, une évocation.
Elle conclut que c’est à juste titre que la demande d’enregistrement du signe NORMINDIA, fortement évocatrice de la région normande, a été refusée pour des boissons alcoolisées ne bénéficiant pas de l’une de ces IGP.
Cette décision est à notre sens très sévère dans la comparaison des signes. Elle s’inscrit toutefois dans un contexte jurisprudentiel tendant à la (sur)protection des AOP et IGP (Cf. la récente et très commentée affaire Champanillo CJUE, C-783/19, 9 septembre 2021).
“J’irai revoir ma Normandie” CA Paris 17 déc. 2021” un commentaire de Vincent Mauriac, avocat associé au sein du cabinet MAURIAC AVOCATS et Mathilde Cron, avocate collaboratrice au sein du cabinet MAURIAC AVOCATS